samedi 31 octobre 2015

3 - OUÏR - VOIR



par Tonia, 31.10.15, version révisée
b) Titre: Lacombe Lucien
Réalisateur: Louis Malle
Scénariste: Patrick Modiano et Louis Malle
Année de sortie: 1974
Acteurs principaux: Pierre Blaise, Aurore Clément
Durée: 132 minutes
Genre: film dramatique

c) et d) Choix de deux séquences et explication de leur importance


Première scène: L'entrée dans le monde des collaborateurs
Après être rejeté par Peyssac, un des chefs locaux de la Résistance, qui ne veut pas que Lucien devienne membre de la Résistance, Lucien se sent exclu et mis à l'écart. Il part en ville où il entre presque par hasard dans le monde des collaborateurs.
La scène montre l'arrivée en ville de Lucien et son premier contact avec le monde des collaborateurs. L'ambiance sombre et tranquille du début, dérangée seulement par les aboiements de chien, est interrompue par l'arrivée d'une voiture. Alors la situation change. On entend le chant d'un homme et le rire des trois femmes qui sont avec lui dans la voiture décapotable. Lucien observe le groupe entrer dans l'Hôtel des Grottes. L'image de Lucien, à l'ombre, qui regarde avec étonnement et désir l'hôtel éclairé d'où sortent des rires et de la musique joyeuse qui condense le sentiment d'espoir dont il est saisi et en même temps trahit l'illusion en quoi consiste cet espoir. Lucien est fasciné par l'aspect séduisant de l'Hôtel des Grottes, par les belles voitures et les jolies filles. Paysan frustré et défavorisé, Lucien n'a jamais vu auparavant un tel luxe et se sent attiré par ce nouveau monde. Lucien est arraché à sa paralysie par un gardien qui le soupçonne d'espionnage et l'amène à l'intérieur de l'hôtel.
Cet épisode met en scène l'entrée de Lucien dans le monde des collaborateurs et le commencement d'une nouvelle vie.

Deuxième scène: Lucien et la famille Horn
Pendant sa vie en ville, Lucien fait la connaissance de la famille Horn. Cette famille juive représente un monde opposé au milieu corrompu des collaborateurs, mais aussi à la vie de campagne. Pour Lucien, cette famille représente une famille de substitution où il trouve  amour familial et reconnaissance, deux sentiments qu'il n'a jamais connus. Néanmoins, Lucien n'est pas conscient de sa situation paradoxale. Il se sent à l'aise dans cette famille juive, mais en même temps il travaille pour son ennemi. Lucien est un personnage naïf et égocentrique qui agit instinctivement, sans analyser rationnellement la situation. Le jeu au piano de France, fille de Monsieur Horn et amante de Lucien, Madame Horn, grand-mère de France, qui s'affaire dans la cuisine, réunie en son salon, Monsieur Horn en train de coudre, forment le tableau d'une famille harmonieuse et parmi laquelle Lucien se sent à l'aise. Mais l'air sévère de M. Horn et le fait qu'il ferme la porte pour empêcher Lucien d'observer France, montre que le père n'approuve pas la relation entre les jeunes. En revanche, la réouverture de la porte et le regard provocant de Lucien montrent le pouvoir de celui-ci. Lucien pose une question provocante : Il veut savoir ce que le père dirait s'il épousait France. Le spectateur observe la réaction du père à travers le miroir et voit comment Monsieur Horn arrête son travail pour se tourner vers Lucien. Sa réponse résume la relation complexe entre les deux: «C'est curieux, je n'arrive pas à vous détester tout à fait.» D'un côté il éprouve de la haine pour ce jeune fachiste qui représente l'ennemi et qui est le séducteur de sa fille. De l'autre côté, il est sensible aux troubles et à la naïveté de Lucien et a pitié de lui.

e) Deux explications
Acteurs non-professionnels
Louis Malle a choisi un acteur non-professionnel pour le rôle de Lucien. Pierre Blaise, d'origine paysanne et capable de s'identifier au personnage de Lucien, répondait parfaitement aux exigences de Louis Malle. L'autre acteur non-professionnel est Aurore Clément, dans son rôle de France. Néanmoins, le metteur en scène affirme que ce n'était pas toujours facile de tourner un film avec des gens qui ne sont pas habitués à bouger devant une caméra.

Choix du sujet
Deux épisodes de la vie de Louis Malle l'ont incité à tourner un film sur ce sujet. Le premier sont les expériences de Louis Malle à la fin de la guerre d'Algérie où il fut choqué par la duplicité d'un jeune officier qui d'une part était très charment avec lui et d'autre part se montrait sans pitié dans sa manière cruelle de torturer les gens. En 1971, lors du tournage d'un film en Mexique, il a pu observer la brutalité et le cruel plaisir que les jeunes miliciens mexicains d'origine modeste ressentaient en torturant des étudiants. Ce sentiment de la jalousie qui se manifeste par la destruction est aussi présent dans le film Lacombe Lucien quand Lucien, lors d'une opération de la police allemande, casse le mât du bateau d'un jeune bourgeois.  Comme il ne pouvait pas tourner un film sur les événements en Mexique, il a donc transporté le sujet dans la France de 1944.

jeudi 29 octobre 2015



Traduction Emmanuel Buettler


A) JEAN-LUC PERSÉCUTÉ
Jean-Luc Robille prit son chapeau et son bâton après avoir mangé, parce qu’on avait convenu qu’il irait ce dimanche à Sasseneire pour regarder une chèvre. Alors il donna un bisou à sa femme, parce qu’il l’aimait beaucoup et ils n’étaient mariés depuis que deux années seulement. Elle lui demanda : « Quand seras-tu de retour ? » Il répondit : « Vers six heures. Maintenant je dois me dépêcher, parce que Simon m’attend, et il n’aime pas quand on le fait attendre. »
Mais avant qu’il quittait la maison, il pénétra dans la chambre sur la pointe des pieds et alla vers le berceau où dormait le petit, qui était né un an auparavant. « Fais attention ! » s’écria Christine. Il s’est déjà penché en avant, mais il ne le baisa pas comme il l’aurait voulu le faire avant encore, il regarda seulement comme il dormait. C’était un garçon costaud de onze mois et deux semaines (car au début on compte encore les semaines et les jours), ses joux étaient vernies et la grande tête ronde reposait sur le coussin. Le berceau qui était fait par Jean-Luc lui-même : il était menuisier de métier et il travaillait même dans ce métier avant de prendre en charge la maison de sa mère. Alors il se tint un moment au-dessus du berceau, puis il retourna dans la cuisine et ouvrit la porte. « Adieu, ma femme », dit-il et lui donna encore une fois un baiser.
(…)
Il revint à la maison plus tôt que prévu, monta les escaliers, poussa le loquet ; la porte était fermée. Il pensa : »Elle sera allée chez Marie », il se courba et prit la clé sous le tas de bois où on la tenait cachée. Puis il pensa : « Je veux voir si elle se trouve chez Marie. »Il ne l’y trouva pas et Marie n’avait pas vu Christine, et le mari de Marie non plus qui lisait le journal et leva les yeux à ce moment-là et dit à Jean-Luc, comme il aimait plaisanter : « Quand on a une femme on n’ose pas la laisser seule. » Jean-Luc ne répondit rien, il était inquiet.

B) EXPLICATION DE GRAMMAIRE

1. Concordance des temps : a) imparfait b) passé composé c) passé simple
a) L’imparfait décrit une action dans le passé qui est une répétition, un état ou une action qui est interrompue par une autre étape dans le récit. L’imparfait est utilisé pour des actions qui sont répétitives, habituelles et dans arrière-plan.
Exemple : Elle dérangea son père qui lisait le journal.

b) Le passé composé décrit une action finie, unique dans le passé. L’action commence et fini au passé et elle a une certaine influence au présent ou même au futur.
Exemple : Elle s’est levée, puis elle a pris une douche et finalement elle a mangé son petit-déjeuner.

c) Le passé simple a les mêmes caractéristiques que le passé composé : l’unicité de l’action dans le passé qui se passe en premier plan.
Exemple : Le Duc d’ Anjou naquît en 1551 à Fontainebleau et fut élevé (passé antérieur) par Jéléna, sa maîtresse qui l’emmena toujours à la messe dans la cathédrale de Notre-Dame à Paris.





2. Pronoms et leurs positions
Les pronoms se placent toujours avant le verbe conjugué, sauf s’il y a un verbe à l’infinitif dans la phrase, dans ce cas-là le pronom se place avant l’infinitif.
Exemple : Je vais la lui donner. (donner qc. à qn.)
aider à qn. à je lui aide.
aimer qn à je l’aime.

3. Les connecteurs logiques
de raison : parce que (weil), car (denn), alors (also, so), puisque (weil)
Exemples : Il mangea parce qu’il avait faim alors il prit le pain et le coupa puisqu’il l’aimait ainsi.

C) THÈMES EXPRIMÉS DANS L’EXTRAIT ET LEURS SIGNIFICATIONS
Jean-Luc quitte sa femme et lui dit adieu pour s’occuper de ses affaires. Déjà l’expression « adieu » indique au lecteur qu’il ne la reverra probablement jamais, parce que si on était convaincu de se revoir on dirait plutôt « au revoir » au lieu de « adieu ». En outre le mari de Marie mentionne qu'il ne faut jamais laisser sa femme seule, Avec la disparition de Christine ce commentaire taquinant obtient une signification plus large et lourde. Bref, cet extrait nous dévoile la puissance des « bon mots » soi-disant innocents.